Accueil - Droit de grève et sphère publique
A propos de Cour Administrative d’Appel de Marseille, 4 juin 2024, n° 22MA02688
Une décision vient préciser les conditions d’aménagement de l’exercice du droit de grève dans la sphère publique.
Si l’accord soumis à censure est annulé, les principes applicables et les marges de manœuvre des autorités compétentes sont eux clairement affirmés. Il ne faut pour autant et pour les juges saisis pas anticiper trop généralement les situations et réagir en fonction des troubles et nécessités effectivement observés lors du mouvement. L’équilibre à trouver entre droit de grève et continuité du service ou prévention des désordres permet bien des interventions pratiques. Dans un approche pragmatique qui s’accommode juridiquement difficilement de l’édiction de règles « générales ». Arrêt à lire attentivement pour ne pas rater sa portée opérationnelle et organisationnelle.
En cause, l’obligation faite aux agents publics d’informer leur employeur de l’intention de participer à un mouvement de grève. Au cas particulier un accord collectif avait déterminé les modalités d’exercice pratiques du droit de grève une fois cette intention manifestée : de la prise de service jusqu’à son terme.
Analyse de la juridiction :
6. Il résulte des dispositions du II et du III de l’article 7-2 de la loi du 26 janvier 1984 que les agents ayant l’intention de participer à une grève en informent l’autorité territoriale au plus tard quarante-huit heures avant cette participation. Cette autorité est ainsi mise en mesure d’apprécier si le nombre des agents grévistes et la nature des fonctions qu’ils exercent permettent ou non le maintien d’un effectif suffisant pour garantir la continuité du service public, ou si, au contraire, il existe un risque de désordre manifeste dans l’exécution du service, tel que, notamment, le risque de ne pas servir de repas aux enfants accueillis dans les écoles.
Dans l’hypothèse où un tel risque existe, l’autorité territoriale a la possibilité d’imposer aux agents ayant déclaré leur intention de participer à la grève d’exercer leur droit de grève dès leur prise de service et jusqu’à son terme. En revanche, ces dispositions n’ont ni pour objet ni pour effet de permettre à l’autorité territoriale, alors que ses agents n’ont pas encore déclaré leur intention de participer à une grève et qu’elle n’a nécessairement pas pu se livrer à une telle appréciation, d’imposer de manière générale et préalable à tous les agents d’un service d’exercer le droit de grève dès la prise de service et jusqu’au terme de celui-ci.
En résumé, une telle mesure est légalement possible et poursuit bien un but légitime mais pour autant, elle suppose :
-que les agents aient exprimé leur intention,
-que les conséquences attachées aux déclarations aient été analysées,
-qu’elles aient été appréciées dans le contexte du mouvement annoncé.
Hors conditions particulières propres à certains services publics, cela réduit le périmètre des accords préalables possibles. Guérir mais pas prévenir.